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Comment le social learning est devenu un incontournable dans les dispositifs de formation professionnelle ?

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Social learning, entreprise apprenante, intelligence collective… autant de termes qui reviennent régulièrement à la mode, enrobés d’une sauce différente à chaque fois, plus ou moins goûteuses…

Que cherchent les pédagogues experts derrière ces formules inspirantes ? Quelle réalité concrète couvrent-elles ? Vendeurs de rêves ou visionnaires enthousiastes, comment faire la part des choses dans des entreprises qui s’accordent de plus en plus à mettre la formation et le développement de leurs collaborateurs au cœur de leur stratégie (1) ?

Revenons quelques pas en arrière…

L’essor des technologies de l’information dans les années 2000 a vite ringardisé les formations en salle jugées trop scolaires et onéreuses. Ont donc suivi des dispositifs plus « expérientiels » ou plus « digitaux » qui ont chacun connu leurs heures de gloire mais avec leurs limites soit en termes d’efficacité pédagogique, soit en termes d’engagement, soit… les deux. Les serious game ont ouvert la voix de la gamification, l’avènement des MOOC a apporté la notion de séquencement rythmé de la formation et posé les bases de l’apprentissage entre pairs à distance. 

La liste n’est pas exhaustive mais vous comprenez l’idée : le Digital Learning – ou toute autre dénomination scientifico-marketing caractérisant les nouvelles formes d’apprentissage – ne doit pas faire l’erreur d’effacer ou de dévaloriser les différentes modalités qui lui ont succédé, car elles ont toutes participé à la construction d’un édifice multimodal qui regorge de possibilités.

Qu’est-ce que le social learning ou apprentissage social ?

Le Social Learning – que nous définirons comme la possibilité d’apprendre via des interactions riches présentielles ou distancielles, entre pairs et/ou avec experts – est plutôt selon nous à considérer comme une nouvelle couleur sur la palette du formateur, à mixer avec les teintes existantes pour mettre en place un apprentissage riche et durable. 

La puissance apportée par ces interactions n’est pas nouvelle, nous avons tous des souvenirs ancrés d’apprentissage à la volée glanés lors de discussions de fin de session, de débat autour d’un café (ou d’une bière en fonction de l’heure) ou de manipulations concrètes sur le plan de travail quel que soit sa forme.

Ainsi, cet apprentissage participatif est basé sur la coopération et le partage d’informations entre les apprenants, qui quittent le statut passif de l’élève traditionnel pour devenir ensemble acteurs de leur formation.

La théorie de l’apprentissage social

Développée par le psychologue Albert Bandura, la théorie de l’apprentissage social montre que la majorité des actions que nous accomplissons sont basées sur des expériences acquises à travers d’autres personnes (ce que Bandura appelle des « expériences vicaires »).

En effet, nous possédons tous un certain nombre de personnes référentes dans notre entourage, qui nous inspirent et nous transmettent des connaissances à différentes étapes de notre vie, qu’il s’agisse de notre mère, de notre père, d’un professeur, d’un ami ou encore d’une personnalité publique.

Ainsi, nous reproduisons de manière inconsciente les comportements que nous percevons chez ces personnes inspirantes. Toutefois, nous observons et évaluons attentivement ces modèles avant de les adopter. Lorsque nous avons recours à notre mémoire, nous générons des images mentales représentant les comportements de nos modèles, puis nous choisissons de les imiter ou non.

Cette théorie met donc en évidence le rôle central des interactions sociales dans l’assimilation et la mémorisation des connaissances.

Les caractéristiques du social learning

Aujourd’hui, nous observons trois caractéristiques majeures : :

  1. la modalité est plus digitale : le partage se fait à distance, via des outils de discussion instantanée ou des forums d’échange,
  2. les volumes d’informations échangées sont exponentiels et protéiformes,
  3. les personnes qui échangent ne se connaissent pas forcément, ne se sont parfois jamais vues.

À chaque caractéristique son défi. Pour la première, il s’agit d’une robustesse technologique et ergonomique : que l’espace virtuel où a lieu l’interaction soit opérationnel et accessible. Pour la seconde : il faut apprendre à faire un tri sélectif (ma grande passion) parmi toutes les informations disponibles et ce tri ne doit pas être réalisé avec le hachoir du temps, il doit être fait de manière consciente par pertinence et non de manière passive en fonction du temps disponible. Enfin pour le dernier, il convient d’être avant tout ouvert et bienveillant pour accueillir des inputs variés mais tout de même prudent et exigeant pour sélectionner les contributions qui font sens et apportent une réelle valeur ajoutée.

Les avantages du social learning

Le social learning (ou apprentissage social) devient de plus en plus incontournable dans le monde de la formation, y compris en entreprise. Et pour cause, il présente de nombreux avantages, tant pour les apprenants que pour les organisations.

Réduire les coûts de formation

C’est indéniable : la formation est un centre de coûts important pour les organisations. Or, le social learning est un levier efficace pour réaliser des économies, car il offre un retour sur investissement (ROI) nettement supérieur à celui d’une formation traditionnelle.

Cela s’explique par deux principaux facteurs :

  • D’abord, l’apprentissage collaboratif permet de capitaliser sur les connaissances déjà acquises par les collaborateurs. En favorisant le partage d’informations et de bonnes pratiques entre les apprenants, cette méthode d’apprentissage limite ainsi les interventions coûteuses de formateurs externes.
  • D’autre part, le social learning requiert moins de ressources et d’infrastructures qu’une formation classique. En effet, il exploite souvent des outils collaboratifs déjà présents au sein de l’entreprise : réseau social, logiciel de messagerie instantanée, intranet, etc. Le principal investissement à réaliser pour passer au « collaborative learning » concerne la mise en place de nouveaux processus et méthodes d’apprentissage.

Renforcer l’efficacité de la formation professionnelle

En reliant les apprenants entre eux et en favorisant le partage des connaissances, le social learning permet d’optimiser la formation et de développer efficacement les compétences des salariés.

En effet, comparée à la formation traditionnelle, cette méthode d’apprentissage informelle permet d’assimiler plus aisément les savoirs. De plus, les apprenants évoluent ensemble tout au long du programme, ce qui leur permet de réellement s’approprier leurs nouvelles compétences.

// En savoir plus : Le rôle essentiel du groupe dans l’apprentissage.

L’apprentissage social est aussi un puissant levier pour augmenter la motivation des apprenants. En effet, ces derniers s’investissent davantage dans leur formation si elle inclut des interactions sociales et si elle valorise le savoir-faire de chacun. Par conséquent, le taux de complétion des formations basées sur le social learning est particulièrement élevé.

Avec le social learning, l’apprentissage fait partie intégrante du quotidien des collaborateurs. Or, les partages d’informations et les retours d’expérience leur permettent de mettre à jour leurs connaissances en permanence. Un véritable atout, dans un environnement professionnel de plus en plus mouvant.

Fidéliser les collaborateurs

Le social learning est entièrement basé sur la participation et l’engagement des apprenants dans leur parcours de formation. Il stimule donc l’investissement des collaborateurs, tout en valorisant leurs compétences et leurs expertises propres. Cela suscite une forte reconnaissance au sein de l’équipe, qui se traduit par une satisfaction plus élevée.

Par ailleurs, l’apprentissage collaboratif encourage le travail d’équipe et les interactions sociales. Il en résulte une communication interne plus fluide, mais aussi une meilleure cohésion de groupe. Par conséquent, le sentiment d’appartenance des collaborateurs est renforcé.

Or, un employé satisfait est un employé fidèle : c’est pourquoi l’apprentissage par les pairs est particulièrement utile dans les secteurs très concurrentiels, où la rétention des talents est un enjeu crucial.

En effet, le développement professionnel est une priorité pour les collaborateurs, qui sont à la recherche d’une entreprise capable de les aider à acquérir de nouvelles expertises et à développer leurs compétences actuelles. Le social learning est donc un véritable atout pour augmenter l’attractivité de la société et fidéliser les salariés.

Mieux intégrer les nouveaux employés

L’onboarding des nouvelles recrues est une étape cruciale pour l’entreprise, qui doit tout mettre en œuvre pour optimiser leur accueil, tout en réduisant cette phase d’intégration. En effet, plus les employés prennent du temps pour devenir 100 % opérationnels, plus l’entreprise perd en productivité.

Heureusement, l’aspect collaboratif du social learning permet d’améliorer sensiblement l’onboarding des talents, car il encourage les interactions sociales entre collègues. La communication est donc beaucoup plus fluide : les nouvelles recrues n’hésitent pas à demander conseil aux employés plus expérimentés et ces derniers leur apportent volontiers les réponses dont ils ont besoin.

Augmenter les performances de l’entreprise

La multiplication des échanges et des partages d’informations a des effets bénéfiques qui vont bien au-delà de la formation professionnelle. En effet, l’apprentissage social stimule la recherche et l’innovation, tout en optimisant les processus de résolution de problèmes. Il en résulte une véritable émulation intellectuelle, dont l’impact sur les performances de l’entreprise est très positif.

Les limites du social learning

Malgré ses nombreux atouts, l’apprentissage social n’est pas exempt de défauts. D’où l’importance de bien connaître les contraintes liées à cette méthode d’apprentissage.

Une modalité de formation difficile à structurer

En général, une formation professionnelle classique est relativement simple à structurer, puisqu’il est possible de suivre des schémas existants. Mais l’apprentissage social est beaucoup plus informel, ce qui peut compliquer sa mise en œuvre.

Concernant l’encadrement de la formation, par exemple, il est difficile de trouver le juste milieu. En effet, il ne doit pas être trop présent pour ne pas nuire à la spontanéité des interactions sociales et des partages d’informations. Mais, d’un autre côté, les collaborateurs ne doivent pas être totalement livrés à eux-mêmes : l’apprentissage risquerait de perdre en efficacité. Pour tirer profit du social learning, l’entreprise doit donc réinventer ses processus et son organisation.

Les difficultés liés à la planification et à l’évaluation

L’apprentissage par les pairs peut difficilement être planifié à l’aide d’un programme précis : ce sont la participation active des apprenants et leurs interactions sociales qui vont rythmer la formation. Par conséquent, il n’est pas évident de mesurer le temps consacré à l’apprentissage.

Par ailleurs, la valeur ajoutée apportée par le social learning est plus délicate à mesurer à court terme, que ce soit en termes de productivité, d’acquisition de nouveaux savoirs ou de développement des compétences.

La résistance au changement

La nouveauté n’est pas toujours bien acceptée par les équipes, surtout lorsqu’elles ont des habitudes de travail et des modes de fonctionnement bien ancrés. Ainsi, la mise en place du social learning peut être entravée par une certaine résistance au changement.

De plus, tout le monde ne parle pas forcément le même langage au sein d’une organisation. Bien souvent, chaque département de l’entreprise utilise ses propres outils collaboratifs et ses propres codes. Pour maximiser l’efficacité de l’apprentissage social, il est essentiel de décloisonner les différents services et d’harmoniser les pratiques au préalable.

Enfin, le social learning est l’affaire de tous, ce qui signifie que les managers (même les plus hauts placés) doivent s’investir dans son déploiement et contribuer à la transmission des connaissances. L’implication des dirigeants est indispensable pour créer une dynamique propice à ce nouveau mode d’apprentissage et modifier la culture d’entreprise.

Comment mettre en place le social learning en entreprise ?

Compte tenu des atouts et des limites du social learning, il est important de respecter certaines bonnes pratiques pour déployer cette méthode d’apprentissage dans l’entreprise.

En premier lieu, la notion de « communauté d’apprenants » est primordiale : l’entreprise doit inciter les membres du groupe à s’impliquer, à communiquer entre eux et à coopérer. Pour rythmer et stimuler cet apprentissage collaboratif, il est donc intéressant de proposer régulièrement des activités de production et de partage d’idées.

Par ailleurs, l’organisation doit encourager l’usage des outils collaboratifs en ligne, qu’il s’agisse de réseaux sociaux, de forums ou de messageries privées. Ainsi, chacun peut rester informé des événements et des actualités de la communauté d’apprenants. En outre, l’utilisation de ces outils numériques est pertinente dans le cadre du digital learning.

Pour stimuler la motivation et l’engagement des apprenants, il est primordial de mesurer la contribution des différents collaborateurs et de les récompenser pour leur investissement. Enfin, il est recommandé de mettre en œuvre un système d’auto-évaluation, ainsi que des évaluations par les pairs.

Intelligence collective et bêtise individuelle ?

Le social learning ne se résume pas à la consultation passive d’un fil d’actualité, à la distribution d’émoticônes et de pouces levés ou au fait de suivre tel ou tel influenceur.

L’intelligence collective par les intelligences individuelles

Pour faire émerger l’intelligence collective, il est nécessaire déjà qu’il y ait des intelligences individuelles (ah oui mince), et c’est là que le bât blesse. La digitalisation de la formation peut conduire à son appauvrissement tant sur le fond que sur la forme. Il devient tellement facile de produire et de consommer du contenu qu’on en oublie parfois la qualité intrinsèque qui s’impose. En tant que professionnels de la formation en entreprise, nous avons le devoir – sous peine de voir nos métiers disparaître – de maintenir ce critère de qualité. Là encore, pas de recette miracle, chaque organisation peut construire son schéma directeur pédagogique combinant des critères et surtout des indicateurs de mesure multiples et originaux (individuel, collectif, à chaud, à froid, top-down, bottum-up, collaboratif, quantitatif, qualitatif…).

Ceci étant dit, revenons-en à notre sujet, une fois que l’écosystème formation est assis sur des fondations solides dans les modalités et la richesse de ressources proposées, alors le social learning peut permettre de démultiplier la puissance des dispositifs. La notion de User Generated Content (UGC) est particulièrement intéressante pour enrichir des concepts avec des retours d’expérience provenant de sources très variées et la richesse nait de la profusion de ces contributions – de leurs rebonds – qu’ils soient concordants ou dissonants.

Replay : Le social learning inspiré par les usages sur les réseaux sociaux

UGC ou mort annoncée du professionnel de la formation ?

Même si certaines règles de concision, d’élégance et d’éthique sont comparables, on ne participe pas sur un forum pédagogique de la même manière que sur Twitter, Instagram ou LinkedIn… La différence se fait sur la « substantifique moelle » qui doit apporter une valeur ajoutée au sujet et là encore les professionnels des entités L&D peuvent mettre à profit leur savoir-faire pour encourager, tout en les encadrant, les contributions.

Apprendre à apprendre, apprendre à contribuer

Imaginons que l’on puisse créer une compétence universelle de transmission, devenue naturelle car inscrite dans nos « gènes d’apprentissage » dès le plus jeune âge. Je suis optimiste sur ce rêve quand j’observe avec bonheur les initiatives de l’instituteur de mon fils qui favorise les exposés des élèves pour que l’apprentissage des uns (on retient 80% de ce que l’on enseigne (2)) se fasse au profit des autres et dans le partage. Chouette, le social learning dès le CM1 ! Après cette impulsion qui devrait être au cœur de nos systèmes d’enseignement, c’est à l’individu de prendre la relève, de se responsabiliser dans sa capacité à sélectionner et creuser les sujets, à faire fonctionner ses neurones et pas seulement à remplir en mode Tétris son temps de cerveau disponible. Les professionnels de la formation ont donc deux rôles majeurs à jouer : apprendre à apprendre puis apprendre à contribuer.

pyramide apprentissage

Pour finir sur l’émergence réussie d’une dynamique de social learning favorisant l’intelligence collective, j’emprunte à Cécile Dejoux sa grille des 5 R.

grille 5 R cecile dejoux

A nous donc, professionnels de la formation, de construire des dispositifs qui permettent de faire émerger et perdurer le Social Learning au service de l’intelligence collective et à ne pas mettre derrière ce terme des chimères alléchantes qui risquent d’aboutir à l’effet inverse. A chacun de se prendre en main – en tant qu’apprenant – pour contribuer et partager intelligemment. Enfin, à nos entreprises et organisations de se donner les moyens humains et organisationnels pour placer la formation, bien sûr au service de la performance, mais avant tout au service du développement durable des personnes et de nos sociétés.

(1) HR TRENDS 2019 – DELOITTE – 84% des DRH mettent la formation comme leur deuxième priorité stratégique
(2) A rapprocher du fameux 70 – 20 – 10 (70% des apprentissages liés à nos expériences et activités quotidiennes, 20% dans les interactions sociales, 10% en apprentissage traditionnel) et de la pyramide de l’apprentissage

Article publié dans le Digital Learning Book 2019 d’IL&DI.

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Le social learning inspiré par les usages sur les réseaux sociaux

On like, partage, visionne des vidéos, scroll et tweet. Les usages des réseaux sociaux ont profondément changé notre rapport à l’information. Comment le Mobile Learning peut-il s'inspirer de ces usages pour optimiser le recrutement et la fidélisation des apprenants ?

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